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Writer's pictureNaïde Pavelly Obiang

Une femme pardonnée ne vit plus dans le passé

Updated: Jul 18, 2019



Elle n'a jamais oublié.

De temps en temps, elle est curieuse et essaye d’imaginer à qui il pouvait ressembler ; ses goûts, son sport préféré, sa musique ou ses cours favoris… Tant de questions, mais hélas, qui n'auront jamais de réponses.

Malgré les nombreuses saisons de pluies qui se sont écroulées, elle pense encore souvent ressentir un battement de cœur, hurlant dans sa bedaine…Cette fatigue et la torpeur insolente qui l’épuisaient constamment - elle y pense de temps à autre et souri. Elle revit chaque étape de la journée dans sa mémoire et s’attriste devant sa perte.

Le père, son premier partenaire, renia. L'adolescente se sentirait alors abandonnée et remplie de honte ; pas assez forte pour affronter les montagnes de moqueries et d’humiliation qui étaient fortement prévisibles. Elle ne pouvait pas se permettre d'être rejetée par ses parents, et en même temps déshonorer toute sa famille. Alors, dans sa naïveté et la peur, elle plongea.

Quarante ans en ce jour, elle est convaincue qu'elle aurait dû et pût être plus brave. Le souvenir de cet episode cogne à sa porte à chaque fête de mères ; la hantant plus fréquemment maintenant qu'elle souffre d’en devenir une. Sans enfants, elle s'inquiète parfois. Est-ce une punition venant des Dieux ? Peut-être qu’elle a saboté sa seule chance de devenir maman.


La femme qu’elle est devenue fait de son mieux pour ne pas maudire sa culture - sa société. Une société égoïste et insoucieuse de son état d’âme. Une culture qui l'aurait surement pendu si elle n’avait pas risqué sa vie ; et aujourd’hui lui pointe du doigt parce qu’elle n’a pas encore conçu. Une culture jamais satisfaite, amnésique aux pressions qu'elle lui a fait subir dans sa jeunesse.


Pendant des années, elle pensait ne rien se reprocher. Là, avec une spiritualité plus affermie, elle accepte d’encaisser les remords lourds. En analisant toutes ses excuses pour avoir interrompu un destin, elle réalise qu’elle s’est fait piéger par les réalités du temps passé.

Ce qui l’effrayait tant à l’époque n’a plus d’influence. Ce qui semblait honteux a perdu son poids. Ce qui était impardonnable est aujourd’hui dérisoire.

Toutefois, elle demeure consciente que la faute lui revient. Sans doute, sa vie aurait pris un virage peut-être très amer ; cependant, sa situation n'était pas sans recours.

Elle ne peut pas changer le passé et ne peut continuer à vivre dans le regret. De ce fait et en paix avec elle-même, elle poursuit sa vie en se rappelant qu’une femme pardonnée ne regarde plus jamais en arrière.


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